Cinéma et Histoire des Possibles


Un colloque proposé par les Beaux-Arts de Marseille et le Collège International de Philosophie en partenariat avec le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur. Sous la responsabilité de Vanessa Brito, directrice de programme au CIPh, enseignante aux Beaux-Arts de Marseille et Vincent Jacques, directeur de programme au CIPh, enseignant à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles. - 2020



1/7 - Penser l’histoire des discontinuités ou la modernité revisité (56mn)
Conférence inaugurale de Michèle Riot-Sarcey

Historienne, professeure émérite d’histoire contemporaine et d’histoire du genre à l’Université de Paris 8






2/7 - Le « livre sphérique » d’Alexander Kluge : cinéma et littérature (58mn)
Table ronde via skype avec Alexander Kluge (cinéaste et écrivain)

ainsi que Vincent Jacques et Bénédicte Vilgrain (traductrice et éditrice au Théâtre Typographique), ponctuée par la projection d’extraits du film Nouvelles de l’Antiquité idéologique – Marx / Eisenstein / Le Capital (2008).






3/7 - Projection de Traité d’optique (2017, extrait de 4’26") d’Erik Bullot (21 mn)
Suivie d’une discussion avec le cinéaste

Peut-on reprendre un film, en proposer une nouvelle version en vue d’actualiser ses promesses et ses injonctions non tenues ? Peut-on rafraîchir un film, comme on le dit d’un écran d’ordinateur ? On peut par exemple dire le film, raconter sa fabrique et ses aléas au cours d’une conférence. Traité d’optique est un film conférence qui s’interroge sur les conditions de possibilité d’une reprise au cinéma en croisant culture matérielle et utopie, archéologie des médias et récit familial, à propos d’un film d’étude réalisé en 1987.






4/7 - La mouche est dans le vinaigre (55mn)
Conférence-performance d’Adrien Genoudet

(écrivain, cinéaste et chercheur en histoire visuelle, enseignant à l’École Européenne Supérieure de l’Image).
Des liasses de souvenirs, des tas d’images et, au bord de tout cela, un homme mort. Il faut reconstituer, nouer et tisser ce qui reste pour tenter d’en faire un livre, ou un film. Car de lui, de l’homme mort, il ne reste que le goût du vinaigre, de ce qui tourne mal, de ce qui laisse de mauvais souvenirs. Résistance – Indochine – Algérie : parcours d’un corps au XXe siècle par les mots qui restent collés aux yeux.






5/7 - Films de papier : écrire le possible filmique (2h 53mn)

Panel modéré par Marie-Charlotte Calafat (conservatrice du patrimoine, responsable du département des collections et des ressources documentaires du Mucem, co-commissaire de l’exposition Roman-Photo en 2017-2018).

• Paris de Moï Ver : de la nouvelle vision au cinéma moderniste - Conférence de Federico Rossin (programmateur et historien du cinéma) Peut-on parler d’un « film des possibles » qui gît dans un livre de photos ? Quel lien peut-on tisser entre la potentialité cinématographique de la mise en page et du photomontage et la réalisation filmique ? Notre proposition théorique n’est qu’une analyse cinématique du livre Paris de Moï Ver, publié en 1931 avec une préface de Fernand Léger.

• L’utopie du scénario chez Jean-Luc Godard - Conférence de Bamchade Pourvali (essayiste, critique de cinéma et ATER à l’Université Gustave Eiffel) La conférence portera sur la conception du scénario chez Jean-Luc Godard qui mêle image et texte dès la publication du scénario d’Une femme est une femme dans les Cahiers du cinéma en août 1959. Elle s’intéressera aussi au prolongement de ses films sous la forme de livres (romans photos, Le Gai savoir, Histoire(s) du cinéma) ou d’expositions (Voyage(s) en utopie, Sentiments, Signes, Passions) qui proposent des variations d’une œuvre cinématographique originelle continuant ainsi l’histoire des possibles.

• Jeux de choses - Conférence d’Erik Bullot (cinéaste et théoricien de l’art, enseignant à l’École Nationale Supérieure d’Art de Bourges) Où est le cinéma ? Est-il devenu un médium en puissance, virtuel, imaginaire, susceptible d’apparaître sous des avatars nouveaux, démembré et recomposé à la façon d’un rébus ? Réussit-il à conserver son identité au cours de ses métamorphoses ? La vue chancelle-t-elle sur les ressemblances ? Autant de questions posées par le poème de Raymond Roussel, Nouvelles Impressions d’Afrique, et quelques films de Michael Snow et Morgan Fisher.






6/7 - Harun Farocki, projet d’un Vocabulaire d’images (40mn)

Conférence de Bénédicte Vilgrain (traductrice et éditrice au Théâtre Typographique)

Le 7 décembre 1999 à Cologne, à l’occasion de la « 3D International Flusser Lecture », Harun Farocki expose son projet d’un « Vocabulaire d’images ». Vilém Flusser, rappelle Farocki, a écrit : « dans le futur, dire que A aurait B pour sujet ne sera plus pertinent ; on dira seulement : A en relation avec B. » Au cours de la conférence, le cinéaste semble tenir l’outil informatique pour une occasion de faire advenir un langage disciple de la prédiction de Flusser. Mais un langage analytique, plutôt que de composition. Cette « Archive des expressions filmiques », par définition inachevée, a incubé plusieurs films, dont peut-être aussi ceux qui n’en font pas « officiellement » partie...






7/7 - Ponctuations et errances du regard : des trajectoires possibles (1h 24mn)

Conférence de Peter Szendy (philosophe et musicologue, professeur en humanités et en littérature comparée à l’Université de Brown aux États-Unis).

La communication a pour objet l’oculométrie comme aboutissement du contrôle routier du regard, dont le cinéma aura été le grand agent voyer. On évoquera ce qui échappe à ces voiries du visible pour frayer d’autres sentiers possibles. Et on s’attardera notamment sur les oeuvres de Julien Prévieux qui forment sa série intitulée Anthologie des regards.









Ce colloque est une mise en regard d’écritures politiques de l’histoire et de formes expérimentales d’écriture filmique. De la même manière que l’histoire actuelle cherche à « ouvrir le passé », à faire droit aux futurs non-advenus et à leurs potentialités inabouties, nombre de cinéastes et d’artistes travaillent aujourd’hui à partir d’archives pour déployer les potentialités de projets empêchés, abandonnés ou censurés. Chercher à « ouvrir l’image », à explorer les potentiels contenus dans des images d’archive ou dans des scripts de films non-réalisés sont des gestes récurrents dans l’art contemporain qui tentent de raviver toute une gamme de présences spectrales, de désirs et d’espoirs inaccomplis que l’histoire de l’art ou du cinéma n’a pas pu prendre en charge. Peut-on parler d’un « cinéma des possibles » qui serait, tout comme l’histoire, un art des discontinuités ? L’un des enjeux de ce colloque est de saisir comment ces expérimentations narratives provoquent un débordement du cinéma hors de la salle de projection (cinéma élargi, film performatif), qui n’est pas sans rappeler la manière dont les histoires contrefactuelles se voient glisser hors du domaine des faits. Aborder ce qui n’est pas fini dans l’histoire nous incitera à explorerles bords du cinéma et les frontières de la discipline historique.